En Afrique, plus de la moitié des personnes vivant sur le continent tirent leur subsistance de l’agriculture. Pourtant un nombre important de personne souffre de malnutrition avec un taux extrêmement élevé par rapport au reste du monde. S’il est vrai que l’agriculture revêt une importance capitale pour les pays sous-développés, c’est que d’une part le bon fonctionnement du secteur agricole est essentiel pour assurer la sécurité alimentaire et que, d’autre part, les productions agricoles constituent une source majeure de revenu.
Environ 0,2 % des terres agricoles d’Afrique sont cultivées en agriculture biologique, notamment parce que les modes de production, de transformation et de commercialisation des produits biologiques sont mal connus. Dans une telle situation l’agriculture biologique peut-elle permettre de nourrir l’Afrique à sa faim ? En effet, la sécurité alimentaire est assurée quand toutes les personnes, à tout moment, ont économiquement et physiquement accès à une alimentation suffisante, sûre et nutritive, qui satisfait leurs besoins nutritionnels et leurs préférences alimentaires afin de leur permettre de mener une vie active et saine.
L’enjeu quand on parle de promotion d’une agriculture biologique, est de favoriser des systèmes de production alimentaire qui assurent la sécurité alimentaire tout en respectant les limites environnementales de la terre. Etant donné que le marché mondial du bio est en pleine mutation et croissance, les agriculteurs Africains pourraient bien saisir l’opportunité d’accroitre leur production et par la même occasion, booster leur chiffre d’affaire. Souvent proche de mode de production traditionnel, l’agriculture biologique contribue à la préservation des sols et permet aux populations de bénéficier de ressources durables dans un contexte où la pression démographique est très forte.
Une agriculture aux multiples avantages
Au-delà de la préservation des terres, le développement de l’agriculture biologique permettrait à terme aux populations locales d’obtenir une meilleure rémunération de leur travail. Car les produits issus de ce type d’agriculture offrent de meilleures marges que les produits standards. La demande de produits biologiques est en forte croissance dans les pays européens. Les producteurs africains tournés vers les marchés d’exportations pourraient sensiblement améliorer la rentabilité de leurs exploitations après la conversion de leurs surfaces en terres biologiques. Forte utilisatrice de main-d’œuvre, elle peut aussi être une source d’emploi des jeunes dans les zones rurales.
En outre, elle améliore la résilience des systèmes agricoles et réduit les impacts négatifs sur l’environnement et sur la santé des producteurs et des consommateurs. Aussi faut-il noter la fertilisation du sol par l’usage des fumiers et autres déchets domestiques, l’irrigation des terres pour une production à plein temps, le maintien de l’écosystème, la préservation de la flore et de la faune…Ces techniques spécifiques peuvent, dans certaines conditions, accroître la productivité agricole même si les rendements sont pour l’heure, en moyenne inférieurs à ceux de l’agriculture conventionnelle.
Le bio dans un contexte africain

Parfois on se dit que c’est une utopie que de vouloir parler d’une agriculture biologique dans un contexte où nourrir les populations représente encore un défi majeur dans certains pays africains. Cependant, faut-il oser, cette option est envisageable. En effet, réfuter cette possibilité serait admettre volontiers que les engrais, les pesticides et les organismes génétiquement modifiés (OGM) sont indispensables pour nourrir la planète. De telle conception ne profite pas forcément l’Afrique, car, plutôt que de recourir aux engrais chimiques, l’agriculteur africain peut utiliser les engrais organiques qui permettent d’améliorer la fertilité à l’échelle de l’exploitation. Plutôt que de recourir aux pesticides, l’agro écologie propose la lutte contre les ravageurs ; plutôt que de recourir uniquement à la saison pluvieuse pour produire, une irrigation massive peut favoriser la production à plein temps.
Même si les méthodes de l’agriculture moderne participent à accroitre le rendement, et du coup à assurer la sécurité alimentaire, la dégradation du couvert végétal et du sol, la destruction de l’écosystème qu’ils provoquent en contexte africain ne sont pas bénéfiques ni pour la santé de l’Homme ni pour l’environnement. De plus, produire bio c’est retrouver la fierté de produire des aliments sains et recevoir la reconnaissance des consommateurs.
L’agriculture biologique peut bien être une bonne option pour assurer la sécurité alimentaire en Afrique. Même si pour l’heure, elle ne permet pas un rendement meilleur par rapport à l’agriculture conventionnelle, elle reste meilleure que la plupart des systèmes classiques et certainement plus viable à long terme. Faut-il alors promouvoir ‘’le manger sain’’, sans produits chimiques ou ‘’le manger beaucoup’’ dans un contexte africain où l’accès aux soins de santé de qualité des populations est encore un casse-tête pour les dirigeants ? Encore que produire une quantité suffisante de nourriture est loin d’être synonyme de sécurité alimentaire.
Eliane Fatchina