« Femmes et les Sciences, Technologies, Ingénierie et les Mathématiques pour le développement du Bénin ». C’est le thème développé au cours de la conférence inaugurale marquant l’ouverture de la rentrée académique solennelle 2021-2022 à l’Université Nationale des Sciences, Technologies, Ingénierie et Mathématiques (UNSTIM-Abomey) le jeudi 25 Novembre 2021 à Abomey. Cette conférence inaugurale présentée par Mme Clotilde Tognon GUIDI Professeur Titulaire/CAMES) fait l’état des lieux sur la question.
«Parler des Sciences à vos enfants surtout aux filles ». C’est un appel de Mme Clotilde Tognon GUIDI Professeur Titulaire/CAMES lancé au cours de la cérémonie de la rentrée académique solennelle 2021-2022 à l’Université thématique d’Abomey dans le centre du Bénin. En effet, les Universités du pays comptent moins de filles en STIM (sciences technologie ingénierie et mathématiques) alors que les femmes représentent plus de 51% de la population du Bénin, 40% de la main d’œuvre mondiale dont 43% en agriculture. Peut-on se passer de ses femmes pour construire une nation forte où le numérique, la technologie, l’ingénierie voire les mathématiques sont devenus incontournables dans le processus de développement des grandes nations ? s’interroge la conférencière.
STIM et orientations universitaires au Bénin
Les apprenants fuient les filières scientifiques surtout les STIM au profit d’autres choix universitaires. Le dernier Annuaire Statistique de 2017 du Ministère de l’Enseignement Supérieur souligne que 16,85% des diplômes sont obtenus dans les STIM contre 83,15% en Sciences Sociales, Economie, le Commerce, le droit etc… Le phénomène est moins criard chez les garçons mais très accentué chez les filles dans nos collèges et universités. A titre illustratif, « au cours de l’année académique 2016-2017, seulement 15,02% de filles sont inscrites dans les filières de Sciences et Technologie à l’Université Nationale des Sciences, Technologies, Ingénierie et Mathématiques (UNSTIM-Abomey) contre un taux de 84% pour les garçons » dans une université nationale pourtant dédiée aux STIM. Même réalité observée à l’Institut National Supérieur des classes préparatoires aux Etudes d’Ingénieur (INSPEI) où sur 46 étudiants inscrits en 2016, il y a eu seulement quatre (04) filles soit un taux de 8,69% pour les filles, contre 91,61% pour les garçons a fait savoir le professeur devant les autorités et le Recteur. La conséquence de ce phénomène est visible déjà par la faible représentativité des femmes dans le monde universitaire au Bénin. En effet, dans l’Annuaire des femmes Scientifiques au Bénin, 2013, le taux de représentativité des femmes dans l’Enseignement supérieur gravite autour de 10% y compris les STIM précise Mme Tognon. Il faut donc relever en urgence ce défi. Elle invite pour cette mission le Recteur à organiser des séances de sensibilisation dans les collèges pour encourager les futurs étudiants surtout les jeunes filles à s’intéresser sans crainte aux filières scientifiques.
Femmes et STIM en Afrique et dans le monde.
Le Bénin n’est pas le seul pays au monde à connaître un recul en science en termes de représentativité des femmes. Partout au monde, « il existe une ségrégation prononcée au niveau des disciplines car l’ingénierie et la recherche technologique et industrielle sont dominées par les hommes». En Afrique sub-saharienneseuls 30% des chercheurs sont des femmes. Dans les STIM, ces femmes sont moins payées et publient moins selon un rapport de l’UNESCO. Mais en Egypte, Sénégal, Afrique du sud, Maroc, Nigéria, Rwanda, Cameroun et en Ethiopie on note une forte augmentation de femmes chercheuses. Sur cette liste, le Cap Vert fournit plus d’effort et enregistre plus de 52% de femmes dans le monde des recherches scientifiques suivi de la Tunisie avec 47%.
Dans les pays de l’Union Européenne plus de 75% des étudiants en ingénierie architecture science et informatique sont des hommes ; ce qui justifie la domination des hommes dans ce secteur. En Amérique du Nord, le nombre d’inscription universitaire dans les STIM aurait diminué chez les femmes de 13% entre 1999 et 2005 (Savigny et Deschenes, 2007).
Sources possibles du phénomène au Bénin et en Afrique

Les causes du phénomène sont multiples et varies d’un pays à un autre. Mais de façon spécifique si l’on enregistre moins de femmes dans ces domaines au Bénin et en Afrique, cela est due aux poids de la tradition qui réduit la femme au second rang dans la société .Les parents disent également que les STIM sont des filières dures et réservées aux hommes.
Nous allons leur dire aujourd’hui que « la digitalisation, les TIC et les STIM sont des options plus faciles pour les femmes » affirme l’oratrice. Le déficit d’information et les stéréotypes véhiculés dans la société sont autant de barrières qui empêchent l’évolution des femmes dans ces spécialités. Les affirmations comme ‘’les filles seraient moins douées en mathématique. Les filles ne sont pas faites pour les mathématiques ni pour de longues études. Elles sont faites pour fonder une famille et non pour les sciences’’.Ces illusions ne sont pas du goût du chercheur qui déclare : « Non et non ! Nous n’allons plus accepter de fonder seulement de famille. Nous voulons aussi évoluer comme les hommes parce que le développement du Bénin et de l’Afrique nous incombe aussi ». Alors il n’y a pas lieu de s’interroger sur le genre en STIM car il n’y a pas de différence entre les filles et les garçons ».
Avantages et recommandations
Les titulaires de diplôme en STIM ont des revenus plus élevés et risquent moins de perdre leur emplois et peuvent gagner jusqu’à 26% plus d’argent en moyenne selon le département du commerce des Etats-Unis, 2011.
L’éducation des STIM peut donc se révéler comme un moyen de relever de façon durable le potentiel économique et financier de la femme. Elle confère également aux gens les connaissances, l’habilitation et la liberté économique qui leur permettront de façonner à leur guise leur vie quotidienne. Des recommandations sont donc formulées à l’endroit des Universitaires, des acteurs du système éducatif en l’occurrence le gouvernement. Ces avantages sur-cités devant se traduire par des « actes qui garantiront que les femmes n’assument pas une part disproportionnée du travail non rémunéré à savoir la tache parentale, domestique, éducatif mais qu’elles disposent suffisamment de temps et d’énergie pour marquer de leur empruntes les sciences et les innovations de demain afin de relever les grands défis tels que le développement du Bénin et de l’Afrique. Sensibiliser « l’environnement familial et scolaire. Atténuer les ségrégations éducatives pour l’égalité femmes-hommes selon l’OCEDE. Encourager l’apprentissage des STIM de la maternelle jusqu’à la fin du secondaire. Travailler de concert avec les entreprises, les universités et les organismes du milieu afin de promouvoir les initiatives de mentorat de stages et de programmation coopératives susceptibles d’attirer les femmes». conclue-t-elle.
Bertrand-Gabriel Kpodonou