Le 24 février dernier, la Russie a lancé une opération militaire en Ukraine avec des bombardements à Kiev et dans plusieurs grandes villes du pays. Cette gigantesque crise diplomatique a fait jaillir de lourdes répercussions non seulement sur les pays européens mais également au-delà des frontières continentales. L’Afrique, un continent stratégique dans les relations internationales, n’a pas échappé aux impacts de ce conflit.
Déjà 19 jours que les troupes russes ont envahi l’Ukraine sur l’ordre du président Vladimir Poutine. Des civils et militaires ont été tués. De même, de nombreux avions de chasses, navires et chars ont été détruits depuis le début de ce conflit. Dans le bilan russe publié le 2 mars 2022, Moscou a fait état de 500 soldats tués et environ 1600 blessés du côté des russes. Par contre, le Pentagone a évoqué le mardi 8 mars, une estimation comprise entre 2000 et 4000 morts russes. Des bilans qui ne sont pas exhaustifs vu que les affrontements, toujours, continuent. Du coté ukrainien, aucun bilan n’est encore rendu public. Moscou prétend début mars que 2800 soldats ukrainiens ont été tué.
Dès lors, des milliers d’africains résidents, étudiants comme migrants ont été rapatriés ou ont quitté le pays pour aller se réfugier dans des pays frontaliers. Ainsi, ce conflit est considéré comme le plus dévastateur depuis la seconde guerre mondiale. Car, il a engendré beaucoup d’impact sur la communauté internationale, ce qui n’a probablement pas épargné le continent africain.
L’économie africaine en berne avant le conflit
La situation économique de l’Afrique n’était pas assez favorable avant la crise. En effet, le continent se démerdait pour relancer son économie après pandémie du Covid 19 quand la Russie a envahi l’Ukraine. Pour ce faire, le groupe de la banque mondiale avait mobilisé plus de 157 milliards de dollars pour faire face aux répercussions sanitaires, sociales et économiques de cette crise.
Ensuite, les denrées alimentaires sont devenues chère en Afrique de l’Ouest et au Nord. Une situation à laquelle les gouvernants, déjà, cherchaient une solution de riposte. Selon la Banque africaine de développement, les 43 pays africains, importateurs d’énergie souffrent indirectement de hausse des prix du pétrole, de charbon et de gaz. Cette situation inquiétait déjà les populations avant le conflit russo-ukrainien. Ainsi, les pays en voie de développement sont confrontés à des risques croissants liés à la précarité financière engendrée par la crise sanitaire et l’absence de transparence des données sur la dette, indique le rapport sur le développement dans le monde 2022 de la banque mondiale. Des tas de difficultés que traversaient le continent avant la guerre en Ukraine.
L’Afrique bientôt dans un gouffre socio-économique ?
Par ailleurs, l’envahissement de l’Ukraine par la Russie et les sanctions imposées par l’Organisation des nations unies au Kremlin accélèrent la flambée des prix des matières premières. La hausse continuelle du prix du gaz et de l’énergie constitue une double menace pour l’Afrique. Outre les hydrocarbures, les aides à l’économie africaine pourraient d’abord s’arrêter parce que les grandes puissances et les organisations internationales luttent activement pour trouver d’abord une issue au crise du Kremlin.
L’Afrique subsaharienne fortement dépendante des aides humanitaires, se verra face à de terribles difficultés . Le Kenya, la plus grande puissance de l’Afrique de l’Est et un exportateur de taille de thé vers la Russie pourrait connaître une difficulté au niveau de son industrie vitale de thé. Ceci pour le simple fait que la Russie, l’une des cinq grands pays consommateurs du thé permettait au Kenya de gagner des devises étrangères. Bien plus, la Russie et l’Ukraine fournissent 30% du blé mondial. Du coup, le prix du pain pourrait augmenter dans les pays du Maghreb, largement dépendant du blé. Au Maroc, les transporteurs routiers se sont mis en grève le 7 mars dernier pour protester contre la flambée des prix du gasoil.
La Tunisie quant à elle fait face à une véritable pénurie des denrées alimentaires de base. Les prix des produits de première nécessité tels que le sucre, le riz, la semoule et la farine ont connu une hausse légendaire vu que le pays est à moitié dépendant de l’étranger en denrées alimentaires. Et la majorité de ces produits proviennent de l’Ukraine. A cela va s’ajouter des milliers de ressortissants rapatriés qui viendront gonfler le taux de chômage, déjà très élevé sur le continent. Outre ces répercussions, les activités touristiques prendront un coup. Sans oublier les traumatismes de guerre qui impacteront à jamais les rendements sur le continent.
Les pays africains divisés sur la situation en Ukraine
Il était question le mercredi 2 mars 2022, de condamner l’invasion russe en Ukraine en exprimant son vote devant l’Assemblée Générale des Nation Unies. En effet, sur les 193 pays membres, 141 ont approuvé la résolution tandis que 16 pays africains se sont abstenus et 8 ont brillé par leurs absences. L’Érythrée quant à elle a voté contre ladite résolution.
Le cas frappant à l’œil est l’abstinence du Sénégal dont le président, Macky Sall, président en exercice à l’UA avait soutenu avec l’accord du président de la commission de l’organisation, un cessez-le-feu immédiat. Une abstinence qui a surpris plus d’un. Dans cette même vague figure la Guinée équatoriale, le Burkina Faso et le Mali, trois pays actuellement dirigés par des militaires suite à des coups d’États. Ceux-ci visiblement se refusent d’afficher leurs positions. Spécialement, il serait très difficile pour le Mali et le Centrafrique de voter en défaveur de la Russie pendant qu’il jouit d’une importante aide des Wagner dans la lutte contre le terrorisme.
En tout, l’opinion de 22 pays africains restent insaisissable sur l’actuelle crise en Ukraine. Visiblement, l’Afrique semble partagée ou du moins divisée quant à la situation qui prévaut actuellement en Europe. Et pendant que les pays européens travaillent à trouver une issue de sortie de crise, les pays africains luttent pour rapatrier leurs ressortissants. Cette priorité s’explique par le fait que les africains seraient maltraités et victimes du racisme en Ukraine et en Pologne. Une situation qui inquiète particulièrement les parents qui à leur tour mettent la pression aux gouvernants pour le retour sain et sauf de leurs enfants.
Des géants des hydrocarbures africains pourraient monter en puissance
Les pays africains producteurs d’hydrocarbures pourraient renverser la tendance en mettant à la disposition du continent, leur gaz et leur pétrole. Ainsi, le Nigeria espère remonter la pente en exportant son pétrole vers les zones du continent touchées. Pour combler le manque en hydrocarbure dans les pays de l’Union Européenne, l’Algérie avait déjà annoncée son désir de fournir du gaz à l’Europe. Également, la Libye pourrait aussi exporter sa matière pétrolière à travers le continent. Vu l’urgence de la situation, la commission européenne a exprimé le 8 mars dernier son intention de diversifier son approvisionnement en gaz.
En plus de ces trois principaux producteurs du continent, on retrouve l’Angola, la RDC, le Gabon, le Ghana, la Guinée équatoriale et le Tchad dans le top 10 des producteurs africains de pétrole selon l’OPEP. Ces derniers ont cette chance là de mettre leurs productions à la disposition du continent pour réduire les impacts liés à la guerre en Ukraine. Il est donc très important que les africains se penchent sur la question afin d’éviter une crise sociale et économique sans précédent sur le continent.