Au Kenya, le bois n’est plus forcément la matière de base du charbon. Transformer des excréments humains en charbon est un ingénieux projet à la fois économique et écologique.
Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme. C’est une célèbre citation d’Antoine Lavoisier sur la conservation des masses lors du changement d’état de la matière. Aujourd’hui encore, cette pensée est d’actualité et prend tout son sens si on en arrive à transformer des excréments humains en charbon combustible. En effet, au Kenya, l’entreprise Sanivation située à une centaine de kilomètres de Nairobi, la capitale kényane, est spécialisée dans le recyclage des déchets (excréments) en charbon qui peut servir à la cuisson et au chauffage.
Une source d’énergie respectueuse de l’environnement
En fait, au Kenya, le charbon de bois est le principal moyen utilisé pour faire cuire les aliments. Mais sa production est un vecteur de la déforestation. D’où l’alternative de fabriquer des charbons à base d’excréments humains. Une source d’énergie respectueuse de l’environnement est donc née et fait la fierté des populations locales
« Ce produit s’est en fait imposé sur le marché beaucoup plus rapidement que nous le pensions. Nous vendons actuellement plus de 120 tonnes et nous ne pouvons même pas répondre à la demande du marché. L’utilisation de ce combustible est très importante pour l’environnement dans la mesure où, pour chaque tonne utilisée, nous sauvons 33 arbres », a déclaré Paul Manda, Directeur d’une usine chez Sanivation à la rédaction de Africanews.
Un processus de fabrication assez simple
Le charbon écologique produit par la société Sanivation répond non seulement aux besoins des populations pour la cuisson des aliments mais aussi à un problème sanitaire. En effet, dans cette région de Nakuru, au nord-ouest de Nairobi, seules 27% des habitations sont reliés à un système d’égout. On assiste du coup au déversement de latrines durant la nuit à l’air libre. Ce qui pose déjà un problème de santé publique. Ainsi, pour fabriquer les boules de charbon à base d’excréments, la startup a mis en place un processus de production assez simple.
D’abord, un programme de récolte des déchets a été mis sur pieds grâce à l’installation de nombreuses toilettes sèches et une tournée de camions régulière. La matière fécale ainsi récupérée par les camions citernes, est ensuite emmenée à l’usine de traitement. Là, elle est séchée pendant deux à trois semaines dans une serre, où les températures élevées permettent d’enlever jusqu’à 70 % de l’humidité de la matière. Après le séchage, le produit passe à la carbonisation, à une température de 700 degrés Celsius afin d’en détruire les germes et l’odeur. Ensuite, le produit obtenu est mélangé avec des grains de sable qui ont également été carbonisés. Le tout est enfin aggloméré pour créer de petites boules faciles à brûler.
Avec le temps, l’entreprise a pensé à la fabrication des briquettes de sciure de bois, toujours à base d’excréments humains. Le projet initié depuis des années au Kenya a été mis à rude épreuve avant d’être approuvé par les populations. Aujourd’hui, elles en raffolent car il répond à un problème économique (les briquettes durent plus longtemps) et sanitaire (elles produisent moins de fumée). A travers cette initiative, l’entreprise entend se positionner comme l’alternative à la préservation de l’environnement.