Des conflits entre jeunes et policiers sénégalais auraient fait trois morts ce vendredi 17 juin à Dakar dans un contexte de violence préélectorale. Un bilan non encore confirmé par les autorités. Cette situation fait suite à l’interdiction des autorités sénégalaises aux forces de l’opposition de manifester.
Traditionnellement considéré comme l’un des pays les plus stables d’Afrique, le Sénégal serait-il en train de basculer dans un cycle de violences meurtrières ? C’est l’interrogation qui mérite d’être posée face à l’impasse politique qui met en déclin l’exception sénégalaise.
En effet, différents quartiers de Dakar ont été le théâtre de scènes d’affrontement entre jeunes qui lançaient des pierres et forces de l’ordre qui les tenaient à distance à coups de gaz lacrymogènes ou les dispersaient à l’aide de grenades assourdissantes dans la fumée des pneus incendiés ce vendredi 17 juin. Ainsi, la situation politique est très tendue au pays de la teranga alors que les sénégalais s’apprêtent à renouveler les membres de leur parlement le 31 juillet prochain. Et pour cause, la principale coalition de l’opposition conteste le rejet de sa liste nationale menée par Ousmane Sonko pour lesdites législatives.
« Nous voulons, en tant que citoyen sénégalais, dire ici au président de la République qu’il n’est pas question de choisir ses adversaires puisque le champ politique est libre et accessible à tous ceux qui le veulent. S’il continue à barrer la route aux listes de Yewwi Askan Wi et aux autres listes, les Sénégalais sortiront dans la rue pour manifester », a lancé un manifestant.
Des leaders de l’opposition arrêtés
Dans le même temps, près du domicile d’Ousmane Sonko, un important dispositif de sécurité a été déployé. Le domicile de l’opposant a été ainsi encerclé par les forces de sécurité, l’empêchant d’aller manifester mais également de se rendre à la mosquée pour prier. « Même notre liberté de culte est bafouée aujourd’hui. Les forces de l’ordre m’ont dit qu’elles ont reçu l’ordre de ne pas me laisser sortir », ainsi s’est exprimé M. Sonko, vêtu du boubou traditionnel pour la prière, après s’être heurté à un barrage de policiers.
Selon le parti d’Ousmane Sonko, le maire de Dakar, Barthélémy Dias, un autre adversaire du président sénégalais Macky Sall, a été également bloqué chez lui par la police, tandis que trois autres personnalités de l’opposition à savoir, Déthié Fall, Ahmet Aidara et Mame Diarra Fame, ont été arrêtées. D’après leurs avocats, ces figures sont en garde à vue pour « appel et participation à une manifestation interdite » ou « provocation à un attroupement ».
Trois décès dans les manifestations de ce vendredi

Des heurts et rassemblements ont éclaté de manière dispersée dans la capitale. A Colobane, où les échanges de pierres contre gaz lacrymogène ont duré une grande partie de la journée. Et ensuite à Ziguinchor, la capitale de la Casamance (sud) dont Ousmane Sonko est le maire. Selon le bilan fait par la croix rouge sénégalaise, au moins une personne a trouvé la mort dans ces manifestations. Il s’agit d’un adolescent décédé et calciné dans l’incendie d’une gargote dans le quartier de Colobane. En outre, à Casamance, l’opposition fait mention de deux décès, l’un à Zinguinchor, l’autre dans la ville de Bignona.
En dehors du rejet de la liste de l’opposition aux législatives, les manifestants accusent le président Macky Sall de vouloir briguer un troisième mandat en 2024. « Nous on ne veut pas d’un troisième mandat, mais c’est leurs intentions. Pourquoi ils ne nous laissent pas manifester ? C’est notre droit ! C’est hyper injuste. », a affirmé l’un des manifestants.
Aussi protestent-ils contre la cherté de la vie, dans un contexte de guerre en Ukraine où les prix flambent depuis des mois sur le marché. « On est fatiguées ! Tout est cher ! », déclarent en cœur les femmes.
Dans sa déclaration de vendredi soir, Ousmane Sonko a promis que « ces crimes de plus ne resteront pas impunis ».
Rappelons qu’en mars 2021, les émeutes meurtrières ont fait plus de dix morts dans le pays.