Le Mali, à l’instar de plusieurs pays africains subissent une flambée sans précédent du prix des produits de première nécessité. Face à l’urgence, le pays suspend toute exportation de céréales jusqu’à nouvel ordre afin de sécuriser les marchés nationaux et limiter sa dépendance de l’importation.
Le Conseil National de Transition (CNT) du Mali a annoncé lundi 06 décembre dernier la suspension d’exportation de produits de première nécessité. Entre dans cette liste, le riz, le maïs, les tourteaux et graine de coton, le mil et le sorgho. Cette décision intervient dans un contexte de prévention de pénurie alimentaire afin d’assurer l’autosuffisance. En effet, confronté à une carence latente des produits de base depuis plusieurs semaines, le gouvernement ambitionne de « sécuriser le ravitaillement des marchés nationaux en produits issus de l’agriculture » locale. En amont, le conseil avait décidé quelques semaines plus tôt, (novembre dernier) de réduire de 50% la base taxable à l’importation des produits agricoles pour un coût estimé à 18 milliards de FCFA, soit environ 31 millions de dollars.
Quid de la décision du CNT?
Cette mesure vise essentiellement non seulement à protéger l’économie locale mais aussi à encourager la consommation locale et à réduire le prix des produits sur le marché. Ainsi, en interdisant l’exportation des produits de première nécessité, le Mali, à l’instar de plusieurs Etats de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel se lance dans une démarche de protectionnisme. Même si le pays n’est pas directement menacé, il est dans une zone où plane encore le spectre de la famine causée par la courbe ascendante du prix des produits. Le Bénin, le Burkina-Faso, voisins immédiats du Mali sont touchés aussi par la crise causée par l’inflation sur le marché alimentaire qui frappe l’Afrique de l’Ouest.
Une mesure sur le court terme
A première vue, ces restrictions à l’exportation pourraient atténuer la pénurie. Au Bénin par exemple, après quelques mois d’interdiction d’exportation des produits, le gouvernement a sauté le verrou en octobre dernier en vue de permettre la reprise normale des transactions commerciales. Les autorités avaient justifié cette levée par le fait qu’à la faveur des premières récoltes, il se trouve que la disponibilité des produits vivriers s’est accrue et les prix sont maîtrisés. C’est donc une mesure qui peut à court terme calmer la flambée du prix des produits.
Produire local, consommer local

Outre le risque à écarter, le nouveau plan de développement du gouvernement malien vise à créer de la plus grande valeur ajoutée aux produits locaux. En effet, avec un fort potentiel irrigable, le pays dispose des ressources nécessaires pour devenir l’un des piliers agricoles de l’Afrique de l’Ouest. C’est donc « un nouveau régime alimentaire » qu’incarne désormais le pays de l’Afrique de l’Ouest qui ne veut se nourrir que de ses propres cultures. Fini les exportations de maïs, du riz, du mil, du sorgho ou encore du tourteaux et grain de coton, principales cultures vivrières du pays. Ainsi, le Mali s’engage dans une campagne de promotion du consommer local.
Limiter la dépendance envers l’importation ?
Néanmoins, il est loin d’être certain que l’interdiction des exportations de céréales parvienne à répondre aux besoins des populations. Car, le pays à l’instar de plusieurs autres pays africains importe plus qu’il n’en exporte. A cet effet, le Mali importe 70% des denrées de sa consommation alimentaire, affirme le PAM (Programme Alimentaire Mondial) dans une étude réalisée septembre passé. A titre illustratif, en 2019, les exportations de produits alimentaires du pays atteignaient à peine 25millions de dollars. Alors que le coût total des importations s’élève à 344millions de dollars selon l’observatoire de la complexité économique du MIT. Si la sécurité alimentaire est le principal argument brandi par le gouvernement malien pour justifier la mesure, la consommation locale à son tour, incitera les agriculteurs à augmenter leur production les années à venir. Du coup le taux d’importation diminuerait et le pays aura réussi le challenge de prioriser les produits locaux sur le marché de la consommation afin de limiter sa dépendance envers l’importation.