A N’Djamena, le dialogue national inclusif s’est ouvert ce samedi 20 juillet 2022. Il vise à jeter les bases d’un Tchad nouveau à travers l’organisation des élections libres et démocratiques et la cession du pouvoir aux civils. Les assises réunissent autorités militaires de la transition, groupes rebelles, partis politiques et membres de la société civile.
Plusieurs fois repoussé par le Conseil Militaire de la Transition, le dialogue national inclusif au Tchad a été lancé samedi dernier au Palais du 15 Janvier, dans la capitale N’Djamena. Environ 1400 délégués, membres de syndicats, de partis politiques et du CMT, y prennent part pendant 21 jours, pour échanger sur l’élaboration d’une nouvelle Constitution et la réforme des institutions. Ces sujets seront ensuite soumis à référendum au peuple tchadien. Les assises abordent également les questions de la paix et des libertés fondamentales dans un pays dirigé de main de fer pendant trente ans par le défunt président Marechal Idriss Déby Itno. Seront en outre inéluctablement au menu, l’intégration des rebelles à l’armée ainsi que l’épineuse question de l’inéligibilité des membres de la Transition.
Ce dialogue doit « tracer les voies d’un nouveau départ » vers un « Tchad prospère » débarrassé des « périodes troubles », a affirmé Mahamat Idriss Déby, président du CMT après avoir demandé pardon au nom de son père, Idriss Déby Itno, et au nom de tous ses prédécesseurs. Le nouveau patron du Tchad a également insisté sur le caractère décisif et souverain du dialogue pour le pays.
Le rêve d’un « Tchad prospère »
Dans le discours d’environ trente minutes qu’il a prononcé, Mahamat Idriss Déby n’a pas manqué de faire part de ses ambitions pour son pays qui a connu plusieurs coups d’Etats depuis les indépendances et où le recours aux armes est devenu un moyen de résolution des problèmes.
« Je rêve de la renaissance d’un Tchad résolument tourné vers l’avenir. Je rêve d’un Tchad prospère et moderne où tout le monde a sa place et jouit des mêmes privilèges. Je rêve d’un Tchad où une femme a les mêmes chances qu’un homme pour construire son avenir. Pour l’enfant – surtout la petite fille – elle a droit à une éducation de qualité. Je rêve d’un Tchad où la justice sociale n’est pas un vain mot, mais une véritable réalité où les personnes vulnérables se sentent protégées et fières d’appartenir à la société, un pays où la diya est prohibée », a-t-il laissé entendre.
Dialogue boycotté
Par ailleurs, il faut souligner que ledit dialogue est boycotté par une frange des parties prenantes. Il s’agit notamment du Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (FACT) et de Wakit Tamma. Le premier est l’un des principaux groupes rebelles à l’origine de l’attaque qui a emporté l’ex président Itno Idriss Déby. Le deuxième est une alliance de partis d’opposition et de membres de la société civile. Ces deux regroupements ont refusé de participer aux assises nationales, l’un les considérant comme « biaisé d’avance » et l’autre accusant la junte de perpétuer des « violations des droits humains » et de vouloir se maintenir au pouvoir. Le président du CMT lance un appel à cet effet : « Les portes du dialogue demeurent ouvertes ».
Présent à la cérémonie d’ouverture, le président de la commission de l’Union Africaine, Moussa Faki Mahamat, invitant toutes les parties prenantes à se joindre aux travaux, a insisté : « Il est grand temps de stopper la spirale de la violence » ; « Il est temps d’enterrer la hache de guerre ».
En outre, le représentant de l’UA, étant aussi tchadien a mis l’accent sur la participation de tous pour l’obtention d’un consensus national. « Aucune communauté, aucun groupe, aucun parti ne peut désormais, à lui seul, prétendre gouverner ou diriger ce pays. Votre grand défi, aujourd’hui, est de construire le vieux rêve de consensus national avec intelligence, fraternité, respect, équité et justice », a-t-il dit.
Deux chefs rebelles présents au dialogue
Bien que bafouées par certaines sensibilités politiques, ces assises ont pourtant connu la présence de deux chefs rebelles majeurs. Jeudi dernier, deux importants chefs rebelles tchadiens, Timan Erdimi, chef de l’Union des forces de la résistance (UFR) et Mahamat Nouri, chef de l’Union des forces pour la démocratie et le développement (UFDD) sont tous revenus à N’Djamena après plusieurs années d’exil pour participer auxdits travaux. Ces deux chefs rebelles qui avaient combattu le régime d’Idriss Déby pendant des années envisagent un cessez-le-feu afin de « rebâtir le Tchad »
Après l’ouverture des assises, les travaux débutent effectivement à partir de ce mardi après l’adoption du règlement intérieur et la mise en place du présidium.