On illustre souvent l’armée du royaume de Danxomè par les amazones, l’élite militaire féminine créée par la reine Hanan. Nonobstant, les rois et les chefs de guerre du royaume avaient, eux aussi eu le génie d’imprimer leur empreinte à l’histoire : créer des abris souterrains. Ces derniers sont des lieux de cachette pour échapper aux envahisseurs en période de guerre afin de les prendre à revers. Quelle ingéniosité de la part du béninois ? Quels intérêts une telle infrastructure présente-t-elle pour la population ?
Situé dans la commune de Bohicon, arrondissement d’Agongointo, village de Zoungoudo, au centre du Bénin, le parc archéologique d’Agongointo est l’une des nombreuses traces historiques laissées par le royaume de Danxomè. En effet, ledit site a été découvert en 1998 à l’occasion des travaux de construction d’une route prévue pour désengorger le trafic au cœur de la ville de Bohicon par une société danoise. L’ensemble est constitué par une série de caves d’argiles ferralitiques situées à environ 10mètres sous terre sur une superficie de sept hectares. Cette découverte révèle alors un étonnant site au cœur d’une importante végétation : Le village souterrain d’Agongointo.
Ce sont plus de mille six cents (1600) maisons souterraines qui servaient de stratégie de guerre et de cachette aux soldats pendant la guerre. Ces abris sont appelés en langue locale fon « ahouando » dont la traduction littérale française signifie « trou de guerre ».
Véritable musée à ciel ouvert, mis à jour au terme de longues fouilles archéologiques, ces abris souterrains étaient utilisés par les guerriers d’Abomey pour se cacher lorsqu’il y avait des menaces d’invasion de l’ennemi. Ainsi, ces maisons avaient été taillées et creusées à l’intérieur de la forêt pour être dissimulées. Les très petites entrées sont cachées par des arbres et des plantes aux vertus médicinales. La descente se fait jusqu’à la chambre principale. Cette dernière dessert à son tour d’autres chambres secondaires qui gravitent autour d’elle.
Le génie béninois à l’honneur

A travers ses maisons souterraines, ses temples Vodoun, ses arbres et espaces sacrés et ce jardin aux papillons, le génie béninois s’exprime face à la guerre de l’ennemi. En effet, infrastructure souterraine, ces abris, ont été construits par des guerriers qui n’ont aucune formation en architecture ou en génie civil. Pourtant leurs œuvres répondent à bien des critères de constructions modernes. D’où la preuve de l’ingéniosité et des capacités constructives de l’homme africain depuis des siècles.
En outre, ces abris dans leurs constructions tiennent compte de principes spécifiques : Les notions de géologie qui leur permettaient de maitriser les sols durs et compacts, la géométrie qui leur permettaient de donner une forme à l’entrée de ces abris. De plus ils ont dû se référer à des notions d’acoustique pour maitriser le son émit à l’intérieur de ces ahouando et ne pas se faire repérer par l’ennemi. Des notions en hydraulique sont aussi mises à profit afin de fabriquer les zones où on peut recueillir l’eau. Enfin, ces abris sont construits de façon à recevoir la lumière du soleil vu qu’il n’y avait pas encore d’électricité au 17è siècle. A noter que ces maisons sont sans ciment et sans fer. Pourtant, elles ont résisté pendant des siècles aux intempéries. Inscrit depuis 2008 sur la liste du patrimoine national, ce site expose les techniques de défense utilisées pendant la guerre pour remporter la victoire.
Par ailleurs, le culte vodoun a une place importante sur le site. On y trouve plusieurs autels comme celui du Dan (dieu de la prospérité) schématisé par un arbre entouré d’un ficus étrangleur. Aussi retrouve-t-on un temple du dieu Tohossou où certaines familles viennent y accomplir des rituels périodiquement.
Intérêts du site
DanielZounmèvo, Aménagiste (Consultant indépendant), s’est intéressé à l’environnement du site selon une étude réalisée en 2014 portant sur le sujet « caractérisation écogéographique du site archéologique d’Agongointo à Bohicon ». Il en ressort que le site archéologique d’Agongointo présente plusieurs intérêts pour la population béninoise. D’abord, un intérêt touristique car le site favorise une bonne visibilité de la commune de Bohicon à l’échelle internationale. De plus, il attire les touristes venus non seulement du pays mais aussi de l’étranger découvrir le patrimoine culturel de la région.
Les droits de visite contribuent à l’amélioration des recettes de la commune et par conséquent favorise les investissements dans plusieurs domaines.
Par ailleurs, un intérêt naturel car les espèces aussi bien animales que végétales constituent les richesses naturelles du site. Le jardin botanique qu’abrite le site qui renseigne beaucoup sur la préservation de l’environnement et des diverses espèces est à titre illustratif.
Le musée d’Agongointo allie l’histoire du site à celle du culte Vaudou, indissociable de la culture traditionnelle du Danxomè. Cependant, vue la poussée démographique en cours dans la commune de Bohicon en générale et dans l’arrondissement d’Agongointo en particulier, les espèces du site archéologique d’Agongointo sont menacées.